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Un Vendredi Saint pas comme les autres

  • Writer: Edito 24
    Edito 24
  • Apr 18
  • 2 min read

Par Stacy Tertulien

Autrefois, en Haïti, le Vendredi Saint se vivait dans le silence, la foi et la méditation. Les rues se vidaient, les radios jouaient de la musique douce et sacrée, les fidèles se rendaient à l’église en procession, les cloches se taisaient jusqu’au dimanche de Pâques. C’était un moment où le peuple haïtien, au-delà de ses croyances individuelles, s’unissait dans une atmosphère de paix et de respect.


Mais depuis quelques années déjà, le Vendredi Saint n’a plus la paix d’autrefois. En 2025, la réalité est toute autre. La peur règne là où régnait autrefois la foi. Les rues ne sont plus silencieuses, mais désertées par crainte des balles perdues. Les processions sont annulées dans plusieurs zones à cause de l’insécurité. Même les églises hésitent à organiser des cérémonies publiques. À Port-au-Prince comme en province, des voix s’élèvent pour dire : « Nou pè, nou pa ka viv Vandredi Sen ankò jan sa te ye lontan. »


À cette peur s’ajoute une autre menace : le choléra. Cette vieille plaie, que l’on croyait disparue, revient hanter les quartiers populaires. Le manque d’eau potable, les déchets abandonnés, les hôpitaux débordés — tout cela rappelle que la souffrance est multiple et constante. Plusieurs familles ont dû passer la semaine senn pa senn, priye pa priye, pandan y ap okipe moun ki malad oswa ap chèche swen san lajan.


Le peuple, pourtant, ne baisse pas les bras. Dans certains quartiers, de petits groupes prient en silence chez eux. On allume des bougies. On chante des cantiques bas. Une manière de dire que la foi est peut-être blessée, mais elle n’est pas morte. Le souvenir du vrai Vendredi Sen, li toujou vivan nan kè pèp la, menm si l pa ka viv li deyò.


Le manque d’espoir, bien qu’intense, ne parvient pas à éteindre le courage des Haïtiens. Malgré tout ce que le pays traverse, malgré les ravages de la violence, de la pauvreté et de la maladie, la force intérieure de la nation reste intacte. En cette période difficile, chaque prière, chaque geste de solidarité est un cri contre l’oubli et la résignation. Le Vendredi Saint de 2025 n’est pas seulement un jour de souffrance, mais aussi un jour de résistance. Un jour où le peuple haïtien, même dans ses ténèbres, rappelle au monde qu’il est toujours debout.


Ce vendredi pascal est un miroir de notre époque : la foi affaiblie par la peur, les traditions étouffées par la violence, l’espoir rongé par la maladie. Mais il est aussi un cri. Un appel à retrouver ce pays qui, malgré tout, garde dans ses profondeurs une lumière qui refuse de s’éteindre.

 

 
 
 

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